Capsule 19
IMAGE FAISANT
Astrid, 85 ans déjà…
Chemin faisant, je capte une image à partager, un bel instant.
Image faisant, je pense à ce que je vais vous dire maintenant.
Quand je me promène dans le parc du Vauxhall, je ne peux m’empêcher de passer devant la statue de la reine Astrid, œuvre de l’artiste Victor ROUSSEAU. Cette statue a elle-même une histoire car il s’agit en réalité d’une copie en résine réalisée en 2012, l’original en bronze ayant été volé en 2009.
Je m’arrête devant ce buste et me souviens du destin tragique de cette jeune et belle reine qui restera longtemps dans le cœur des Belges.
Je me souviens de ce jeudi matin…
Nous sommes le 29 août 1935 le long du lac des Quatre-Cantons en Suisse.
Le couple royal belge qui loue une villa sur les bords du lac près de Lucerne se met en route pour une excursion en voiture à travers la Suisse centrale. Aux environs de neuf heures quinze, le roi Léopold est occupé à conduire son cabriolet Packard sur la route qui relie en ligne droite Merlischachen à Küssnacht.
La reine Astrid est à ses côtés et le chauffeur attitré dans la cavité destinée aux bagages située à l’arrière, derrière la capote.
Une tragédie se prépare.
Le roi quitte la route des yeux, soit pour jeter un coup d’œil sur la carte routière que sa femme tient en main, soit pour admirer le mont Rigi.
L’irréparable se produit.
«La voiture suivant la ligne droite, alla vers le remblai. Le conducteur voulut la redresser mais il fut gêné par le dérapage et peut-être aussi surpris par la nouveauté de cette voiture américaine qu’il avait seulement depuis quelques jours et où la démultiplication du volant de direction est beaucoup plus accentuée que sur les voitures courantes. L’auto folle s’engagea dans une des brèches du parapet, fit un tête à queue, glissa par l’arrière sur le talus gazonné et humide, heurta de flanc un premier arbre et fut rejetée sur un second, une quinzaine de mètres plus loin», détaille L’Illustration, journal français de l’époque. La voiture alla s’enliser parmi les roseaux en bordure du lac. Si le chauffeur attitré était à peu près indemne, en revanche le roi et son épouse, tous deux à l’avant, furent éjectés. Léopold III s’en sortit avec quelques coupures au visage par des éclats du pare-brise. Malheureusement, Astrid, qui avait été projetée contre un arbre, avait le crâne fracassé et agonisait.
Selon le chauffeur et des témoins arrivés sur place, Léopold se précipita vers Astrid qui gisait dans l’herbe et la prit dans ses bras. Il l’embrassa alors plusieurs fois ; finalement, il la reposa sur le sol, après l’avoir tenue cinq minutes au moins serrée contre lui.
Elle n’avait pas encore 30 ans. Elle était la nièce du roi de Suède. Elle était la mère de trois enfants, dont le plus jeune –le futur roi Albert II- avait à peine un an.
L’Histoire réserve parfois de bien curieuses coïncidences. Le 31 août 1997, 62 ans presque jour pour jour après la reine Astrid, Diana Spencer, l’ex-épouse du prince Charles et mère de leurs deux enfants les princes William et Harry, trouvait elle aussi la mort dans un accident de voiture. Celui-ci se produisit à Paris sous le tunnel du pont de l’Alma, à deux pas de… la place de la Reine-Astrid. Et, à l’instar de celle de la reine des Belges à son époque, la disparition de l’ancienne belle-fille de la reine Elizabeth II, à l’âge de 36 ans, connut un énorme retentissement dans le monde entier.
Bernard Detry